Cliché n° 4 – La finance est maléfique
Cliché n° 4 – La finance est maléfique (Diapo 12)
“Les banquiers, tous des voleurs !” Flaubert
Une idée toute faite a trait au rôle de la finance privée, qui serait par nature maléfique. L’activité des banques et des marchés financiers est souvent ramenée à des jeux spéculatifs motivés par une cupidité sans limite. Cette caricature est fausse à bien des égards.
La finance est en effet utile.
D’une part, la spéculation est indispensable au fonctionnement de l’économie ; elle consiste à prévoir ce qui a la plus forte probabilit.é d’arriver, et par là, d’orienter les ressources vers les usages les plus prometteurs en réduisant l’incertitude inhérente à toute économie. Cela suppose que sur les marchés financiers, des opérateurs fassent des paris en prenant le risque de les perdre.
Mais c’est le seul point commun avec l’univers des casinos. Amazon, Tesla, Space X, Netflix, Facebook et tant d’autres des nouveaux géants mondiaux sont nés de projets fous au départ qui ont perdu de l’argent pendant des années. Avant de rebattre les cartes dans leurs secteurs, ils ont été ou sont encore tenus à bout de bras par des acteurs de la finance prêts à prendre des risques importants de perte de leur capital. A côté des sociétés de capital-risque, le rôle des banques est de s’appuyer sur leur propre expertise pour sélectionner les projets qui ont le plus de chances d’être opérationnels et d’écarter les autres, ce qui limite les déconvenues.
Quant aux fonds de private equity, ils risquent les capitaux qui leur ont été confiés dans des entreprises non cotées en Bourse dont ils facilitent la transmission, accompagnent le développement et contrôlent la gestion, le plus souvent en améliorant leurs performances.
Par ses différents canaux, la finance rend des services indispensables. Sans elle, rien ne se fait. Elle ne devrait donc pas être notre ennemie.
S’il lui arrive de sortir des clous et d’être le déclencheur de crises aux effets catastrophiques, c’est essentiellement dû aux défauts de sa régulation. Livrées à elles-mêmes, les puissances d’argent peuvent avoir un impact destructeur, comme l’a encore confirmé la crise de 2008.
Mais pourquoi l’administration américaine a-t elle poussé les banques au crime en exigeant qu’elles financent l’acquisition de logements par des ménages insolvables ?
Pourquoi a-t elle peu à peu vidé de sa substance puis fait abroger la loi Glass-Steagall de 1933 ? En séparant les banques de dépôt et les banques d’affaires, cette loi limitait grandement la capacité du système bancaire à déstabiliser l’économie. Pourquoi n’a t-elle pas accordé à la SEC, l’organisme chargé de contrôler les marchés financiers, les moyens d’assurer sa mission ?
Dans la foulée des Etats-Unis, la plupart des pays ont également baissé la garde et dérégulé la sphère financière. Les Etats ont donc leur part de responsabilité dans l’instabilité chronique dont souffrent nos économies, soumises à l’alternance de bulles et de krachs.
On suppose pourtant que, par nature, ils seraient plus vertueux que les opérateurs privés, et que pour résoudre les difficultés, il suffirait de remettre sous leur coupe l’intégralité du financement de l’économie, comme c’était le cas en France pendant les Trente Glorieuses. Ce financement administré a effectivement aidé à la reconstruction de notre pays. Mais très vite après, il s’est essoufflé et a fait la preuve de son inefficacité.
Le contre-exemple de l’ex-URSS confirme le diagnostic. N’y existait qu’une seule banque d’Etat, la Gosbank, qui centralisait toutes les opérations de financement nécessaires pour réaliser le plan. Ce système s’est révélé incapable de soutenir la croissance du pays, dès lors qu’il a fallu raisonner non plus en termes de quantité mais en termes de qualité.