L’économie vue par les économistes classiques (2)

David Ricardo
Les problématiques
- Comment les classiques posent-ils le problème de la valeur ?
- Quelle est leur conception de la répartition ?
1 – La théorie de la valeur-travail
Elle fait du contenu en travail des marchandises le principe selon lequel se déterminent leurs prix relatifs sur un marché concurrentiel. Elle repose sur trois distinctions.
La première distingue valeur d’échange et valeur d’usage. Par son célèbre paradoxe de l’eau et du diamant, Smith cherche à montrer que la valeur d’échange d’une marchandise est sans rapport avec son utilité : l’eau a une forte valeur utilité mais une très faible valeur marchande, le diamant a une très faible valeur utilité mais une forte valeur marchande.
La deuxième distingue biens reproductibles et biens non reproductibles. La valeur de ces derniers dépend de leur utilité et de leur rareté. Mais ils sont très minoritaires par rapport à ceux que peut reproduire “presque sans limite” le travail humain et dont la valeur d’échange est indépendante de la valeur d’usage. La 3ème part de l’idée que les prix des biens correspondent à la somme de ce que pour les produire il faut verser pour rétribuer le travail et le capital mis en œuvre. Leur prix naturels (ou valeur d’échange) sont ceux que l’on aurait si le taux de profit était le même quel que soit le secteur et le taux de salaire le même pour chaque type de travail. Ces taux étant en fait différents selon les secteurs les prix de marché s’en écartent tout en gravitant autour d’eux.
2 – Son évolution de Smith à Ricardo
Sur cette base s’affirme une analyse qui fait du travail le fondement de la valeur. Smith en avait limité la validité à la “société primitive” où il n’y a ni rente ni profit. S’il y faut deux fois plus de temps pour chasser un daim qu’il n’en faut pour chasser un castor, le premier animal coûtera nécessairement, en moyenne, deux fois plus cher que le second. Dans un second temps Ricardo en a affirmé la validité pour les sociétés évoluées en faisant l’hypothèse qu’un travail complexe peut toujours se ramener à des unités de travail simple et en prenant en compte dans le calcul le travail indirect (celui qui est incorporé dans les moyens de production).
Les mots à retenir
- Prix relatifs : prix des biens les uns par rapport aux autres
- Gravitation des prix (suite) : Les prix de marché coïncident rarement avec les prix naturels. A un moment donné, certaines productions sont plus rentables que d’autres, et pour un même type de travail les salariés sont plus ou moins bien rémunérés selon leur secteur d’activité. Mais ces écarts de profit et de salaire produisent des ajustements qui ramènent les prix de marché vers les prix naturels. Ce processus est appelé gravitation des prix
3 – L’analyse classique de la répartition des revenus
La première phrase de la richesse des nations est que « le travail annuel d’une nation est le fonds primitif qui fournit à sa consommation annuelle toutes les choses nécessaires et commodes à la vie ». Il en réulte que les revenus de la propriété (profits et rentes) sont des “déductions” sur le produit du travail. Ainsi pour Ricardo : “tout ce qui augmente les salaires diminue nécessairement les profits”. Il est donc important de déterminer ce qui commande l’évolution des salaires. Le travail étant considéré comme une marchandise a comme toute marchandise un prix naturel et un prix de marché. Le premier, ou salaire de subsistance, est la somme permettant, à chaque période, l’achat du “panier” de biens de consommation nécessaires à l’entretien du travailleur et de sa famille. Il dépend donc de la quantité et du prix des biens entrant dans la composition du panier qui elle-même est liée aux mœurs et coutumes de la population” et n’est donc pas un minimum physiologique.
Si le salaire de marché passe au-dessus de son niveau naturel, les conditions d’existence s’améliorent, la mortalité infantile diminue, ce qui finit par accroitre la quantité de main d’œuvre offerte sur le marché et par faire diminuer les salaires en dessous de leur niveau de subsistance. En résultent surmortalité et émigration puis une pénurie de main d’oeuvre qui fait par la suite remonter les salaires de marché. Ce raisonnement qui fait dépendre le nombre des hommes de paramètres économiques est à relier au principe de population défendu par Malthus.
4 – La théorie de la rente différentielle et le blocage de la croissance
Ricardo pose qu’au fur et à mesure que la population augmente sont mises en culture des terres de moins en moins fertiles ou de plus en plus éloignées des lieux de consommation. Le coût de production de l’alimentation devient de ce fait de plus en plus élevé. Mais si les coûts diffèrent d’une terre à une autre, le prix de marché est unique. Pour les terres les plus fertiles l’écart entre prix et coûts ne cesse d’augmenter. La part du revenu national qu’absorbe cette rente différentielle s’élève de même que celle des salaires (croissante puisque les prix montent) et celle du profit ne cesse de se réduire jusqu’à tomber à un niveau très bas. Le profit étant la clé de l’accumulation du capital, celle-ci se bloque. L’économie entre dans un état stationnaire. Si pour les classiques la croissance n’est pas menacée par des crises de surproduction en vertu de la loi des débouchés, à terme elle doit nécessairement disparaître. La seule solution qu’envisage Ricardo est la suppression des mesures protectionnistes (« corn laws ») empêchant l’importation de blé à bas prix produit à l’étranger. En provoquant la chute des parts de la rente et des salaires, leur abrogation aurait pour effet de faire remonter celle du profit et de repousser l’échéance de l’état stationnaire. Elle sera effective en Grande Bretagne en 1846.
Eléments à retenir
- Le principe de population : la population croit de manière géométrique (1,2,4,8, 16 etc.) et les subsistances au mieux de manière arithmétique (1,2,3,4, 5 etc.).
- La loi des débouchés (suite) : si l’offre crée sa propre demande, il ne peut y avoir de crise générale de surproduction.